Dream Scenario (2023) de Kristoffer Borgli

Après "Sick of Myself" (2023) le réalisateur norvégien Kristoffer Borgli revient avec une autre variation autour de la célébrité soudaine : "Je suis attiré par les personnages têtus, qui vivent selon des principes inaccessibles coûte que coûte. Je considère que la fiction permet d'explorer les aspects sombres et dysfonctionnels de la vie moderne. Il existe une tendance très humaine à se concentrer sur le négatif, sur ce qui nous manque alors que nous avons tout. Nous nous rendons malheureux lorsque nous nous créons des attentes imaginaires." L'idée du film est venu au cinéaste en 2018 après avoir lu une histoire sur un professeur qui a perdu son poste, puis avait reçu une compensation financière après un procès avant de devenir un porte-parole de ce qu'on appelle la "cancel culture" : "A l'époque, il n'y avait pas de mot pour décrire ce qui lui arrivait, mais je me souviens avoir été intéressé par la façon dont les étudiants le suivaient sur le campus lorsqu'il enseignait encore et vandalisaient sa voiture. Cela ressemblait à un vieux western où une personne est chassée de la ville par des habitants en colère. Le scénario m'a semblé très cinématographique."...

Paul Matthews, professeur de biologie de l'évolution, voit sa vie bouleversée quand il commence à rencontrer des personnes inconnues qui lui affirment qu'ils l'ont vu dans leur rêve. Bientôt il semble que des millions de personnes à travers le monde connaissent la même expérience avec Paul Matthews dans leur rêve respectif. Bientôt il devient un phénomène médiatique jusqu'à ce que sa nouvelle célébrité ne prenne une tournure inattendue... Le professeur est incarné par Nicolas Cage qui continue à surprendre son monde avec quelques bijoux comme les récents "Pig" (2021) de Michael Sarnoski, "Un Talent en Or Massif" (2022) de Tom Gornican ou "Renfield" (2023) de Chris McKay. Il croise Julianne Nicholson vue entre autre dans "Moi, Tonya" (2017) de Craig Gillepsie, "Monos" (2019) de Alejandro Landes, "Togo" (2019) de Ericson Core ou "Blonde" (2022) de Andrew Dominik, Michael Cera vu dans "Le Grand Jeu" (2017) de Aaron Sorkin ou "Barbie" (2023) de Greta Gerwig, Tim Meadows vu dans "Jack et Julie" (2011) de Dennis Dugan ou "Hubie Halloween" (2020) de Steven Brill, Dylan Gelula aperçu dans "Horse Girl" (2020) de Jeff Baena ou "Shithouse" (2020) de Cooper Raiff, Dylan Baker vu entre autre dans "Les Sentiers de la Perdition" (2002) et "Les Noces Rebelles" (2008) tous deux de Sam Mendes et plus récemment dans "Selma" (2015) de Ava DuVernay, Kate Berlant surtout vu dans des séries TV outre les films "Once Upon a Time in Hollywood" (2019) de Quentin Tarantino et "Don't Worry Darling" (2022) de et avec Olivia Wilde, Noah Centineo vu dans "Charlie's Angels" (2019) de et avec Elizabeth Banks ou "Black Adam" (2022) de Jaume Collet-Serra, Nicholas Braun vu notamment "Red State" (2011) de Kevin Smith, "Le Monde de Charlie" (2012) de Stephen Chbosky ou "Zola" (2021) de Janicza Bravo... Un professeur lambda, et même aussi austère qu'ennuyeux devient soudain le centre d'intérêt du monde entier, et pas par le moyen le plus anodin qui soit mais par les rêves. L'idée de base est carrément géniale, où comment un inconnu tout ce qu'il y a de plus banal s'invite dans les rêves de millions de gens sans que personne ne puisse rien y comprendre du comment ou du pourquoi. Mais en cette période 2.0 où les réseaux sociaux font et défont les réputations et les renommées cet événement prend une dimension inouïe, le professeur qui rêve de gloire savoure même s'il tente de garder un tems soit peu de distance et de lucidité. On savoure avec lui tant on perçoit aussi vite les petites perfidies, les petits égoïsmes, les petites opportunités au sein même de sa famille.

Mais évidemment rien n'est gratuit, le retour de bâton est attendu, logique et implacable et tout aussi soudain et incompréhensible. Dans le style on pense parfois à  "Adaptation" (2002) de Spike Jonze, déjà avec Nicolas Cage, mais alors que certains voient en cet acteur un has been ce genre de rôle prouve qu'il est encore bel et bien au sommet de son art dans un rôle dément, où sa palette d'émotion et d'autodérision est une expérience à elle seule. Sur le propos de la célébrité on pense au récent "Sick of Myself" (2023) de Kristoffer Borgli en moins satirique peut-être, mais en plus universel avec une citation qui revient comme une certitude : "Si tu te démarques, alors tu fais de toi une cible." d'autant plus pertinent dans une époque où tous les jugements sont définitifs et hâtifs. Mais le film parle aussi de frustration, professionnelle ou artistique, qui sonne comme un malheureux parallèle avec les rêves habités. Par contre, alors qu'on savoure et qu'on aime cette comédie délirante et singulière on aurait aimé que le dernier acte soit du même acabit plutôt que cette conclusion cafardeuse. Mais les idées sont en effervescence, les rêves comme des courts métrages hors contrôle, et surtout on a un Nicolas Cage en grand forme qui porte le film de bout en bout en looser insignifiant qui croit enfin avoir sa chance. Un film original et fou, porté par un acteur fabuleux qui pêche que par cette conclusion soudain trop classique, trop dramatique, trop sérieux. 

Note :                 

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14/20