Le Coup de l'Escalier (1959) de Robert Wise

Voici un film qui est considéré comme un des tous derniers Film Noir, et pas des moindres ne serait-ce que parce qu'il est cité comme référence par un certain Jean-Pierre Melville, maître français du genre avec entre autre "Le Samouraï" (1967) ou "Le Cercle Rouge" (1970). Le réalisateur du film est un des grands cinéaste de Hollywood, plus connu aujourd'hui pour "West Side Story" (1961) et "La Mélodie du Bonheur" (1965) mais qui a déjà signé des Films Noirs avant ce projet avec entre autre "Né pour Tuer" (1947), "La Maison sur la Colline" (1951) ou "Je veux Vivre !" (1958). Sur ce projet, Robert Wise est également producteur, une première pour lui qu'il répétera pour ses prochains films. Le film est une adaptation du roman "Odds against Tomorrow" (1957) de William P. McGivern dont plusieurs oeuvres ont déjà été porté à l'écran dont le film "Règlement de Comptes" (1953) de Fritz Lang. Le scénario est signé de Nelson Gidding qui retrouve Wise après "Je veux Vivre !" (1958) et qui écrira encore plusieurs fois pour le réalisateur, puis surtout Abraham Polonsky, encore marqué du sceau de l'infamie de la Liste Noire issue du Maccarthysme (tout savoir ICI !) et qui a dû signé sous le pseudo John Q. Killens avant d'être réhabiliter plusieurs années plus tard. Polonsky a écrit les scénarios de films comme "Sang et Or" (1947) de Robert Rossen, "Les Anneaux d'Or" (1947) de Mitchell Leisen ou son propre film "L'Enfer de la Corruption" (1948) avant d'être blacklisté... Dave Burke, ex-policier limogé injustement a décidé de se faire une place au soleil. Il a un plan, un projet de braquage de banque qu'il propose à deux connaissances, Earle Slater ancien soldat qui a bien des difficultés à revenir à une vie normale suite à sa démobilisation en 45, puis Johnny Ingram, également ancien soldat mais qui est criblé de dettes auprès d'un caïd alors qu'il doit subvenir à sa fille et son ex-femme qu'il aime toujours. Les deux hommes hésitent et ne sont pas près à accepter un tel risque au départ au grand dam de Burke, mais finalement ne voyant pas d'autres issues les deux hommes acceptent de monter le coup avec Burke, mais un grain de sable va devenir un problème insoluble, le racisme de Slater...

Le Coup de l'Escalier (1959) de Robert Wise

Le vieux Dave Burke est joué par Ed Begley vu justement dans "Sang et Or" (1947) de Robert Rossen, surtout remarqué dans "Douze Hommes en Colère" (1957) de Sidney Lumet avant d'obtenir un Oscar du meilleur second rôle pour "Doux Oiseau de Jeunesse" (1962) de Richard Brooks. Johnny est incarné par Harry Belafonte remarqué dans "Carmen Jones" (1954) de Otto Preminger et "Une Île au Soleil" (1957) de Robert Rossen mais chanteur avant tout il aura une carrière cinéma plutôt discrète jusqu'à récemment dans "BlacKKKlansman" (2018) de Spike Lee, tandis que Earle est joué par Robert Ryan star qui retrouve Robert Wise après "Nous avons gagné ce Soir" (1949) et vu cette même année dans le superbe western "La Chevauchée des Bannis" (1959) de André De Toth, et qui après "Feux Croisés" (1947) de Edward Dmytryk retrouve sa partenaire Gloria Grahame sublime actrice vue entre autre dans "Sous le plus Grand Chapiteau du Monde" (1952) de Cecil B. De Mille, "Les Ensorcelés" (1952) de Vincente Minnelli ou "Règlement de Comptes" (1953) cité plus haut, n'oublions pas l'autre atout charme du film avec Shelley Winters qui retrouve aussi Wise après "La Tour des Ambitieux" (1954) et qui est une des reines du Film Noir après le chef d'oeuvre "La Nuit du Chasseur" (1955) de Charles Laughton, ou encore "Le Grand Couteau" (1955) de Robert Aldrich et "La Peur au Ventre" (1955) de Stuart Heisler. Citons ensuite Kim Hamilton aperçue dans "Le Carnaval des Dieux" (1957) de Richard Brooks et plus tard dans "Du Silence et des Ombres" (1962) de Robert Mulligan ou "Les Anges Sauvages" (1966) de Roger Corman, Richard Bright qui sera omniprésent dans les grands titres des seventies avace entre autre la trilogie "Le Parrain" (1972-1990) de Francis Ford Coppola, ou "Guet-Apens" (1972), "Pat Garrett et Billy the Kid" (1973) et "Apportez-Moi la Tête d'Alfredo Garcia" (1974) tous trois de Sam Peckinpah, Zohra Lampert vue en suite dans "La Fièvre dans le Sang" (1961) de Elia Kazan, "Opening Night" (1977) de John Cassavetes ou "L'Exorciste, la Suite" (1990) de William Peter Blatty... Le film débute avec deux rencontres, où comment un vieux briscard tente de convaincre deux connaissances pour un braquage forcément facile mais qui ira forcément mal. Mais Wise prend le contre-pied du film de braquage classique en s'attardant sur ses personnages avant tout ; Il nous présente ces trois personnages, loosers un peu paumés, qui vont avoir un cheminement différent mais avec le même résultat, accepter le projet pour tenter de changer de vie. Ainsi, ce n'est pas le braquage lui-même qui est au centre du récit, mais le cheminement de chacun. Earle Slater/Ryan et Johnny Ingram/Belafonte refusent tous deux l'idée même du braquage, trop risqué. Ils sont donc lucides malgré leur vie en stand-by.

Le Coup de l'Escalier (1959) de Robert Wise

L'un est en fait inadapté à la vie normale et se fait entretenir par une femme amoureuse qui espère encore qu'il va s'en sortir, l'autre est une sorte de looser magnifique frustré de sa condition d'homme noir qui lui sert d'excuse car flamber lui semble avoir plus de classe que d'aller travailler. Finalement ils vont accepter le projet, car ils ne peuvent envisager un autre moyen de changer de vie rapidement. Robert Wise prend le temps de nous montrer qui sont vraiment ces hommes, afin qu'on comprenne ou pas leur motivation,  allant jusqu'à certains passages qui semblent plus ou moins intéressants. On peut pourtant penser que cette première heure est un peu longue, et qu'elle vampirise la partie braquage qui semble alors un peu vite expédiée. Mais le réalisateur soigne sa mise en scène, prend son temps, et surtout il met en place une bascule du cadrage, les plans larges sont au début plus nombreux avant de se raréfier, les gros plans se font plus importants au fil du récit accentuant du même coup le côté anxiogène. Niveau acting, Belafonte est un peu trop stoïque, notamment avec sa famille dont l'émotion manque un peu, par contre Robert Ryan est une fois de plus impeccable en homme aigri et mal dans sa peau qui se venge donc par des principes primaires, Ed Begley n'est pas en reste, à la fois piteux et touchant. On aurait aimé aussi que les femmes soient moins oubliées, deux sublimes actrices qui sont un peu sous-exploitées. L'atmosphère est délétère ce qui crée un climax singulier avec le jazz qui contre-balance. Sur la notion de racisme, on pense un peu à une anti-thèse du film "La Chaîne" (1958) de Stanley Kramer qui était plus optimiste et teinté d'espoir, ici l'amitié ne sera pas et le racisme est sera bel et bien la cause funeste qui va faire chuter nos braqueurs. Un film prenant qui aurait gagné à un partage entre les deux parties plus égalitaire. 

Note :                 

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16/20