Racket (1980) de John Mackenzie

Malgré un premier long avec "Mort d'un Prof" (1971), c'est surtout à la télévision que le cinéaste britannique John Mackenzie s'est fait la main notamment sur la série TV "Play for Today" (1973-1978). Toujours attiré par les thrillers et les polars il revient avec un projet écrit par Barrie Keeffe qui a rencontré son réalisateur justement à la télévision, écrivant essentiellement jusqu'ici pour des séries TV et téléfilms. Précisons que le film est aussi connu sous le titre "Du Sang sur la Tamise" et en V.O. "The Long Good Friday". Le film a été interdit au moins de 12 ans lors de sa sortie en salles... Parrain régnant sur la pègre londonienne, Harold Shand est en quête de respectabilité depuis que l'entrée du Royaume-Uni dans l'Union Européenne lui permet d'ouvrir son horizon. Il tente alors de s'associer avec plusieurs promoteurs londoniens mais en ayant aussi le soutien de la mafia américaine. Alors que les émissaires d'outre-Atlantique sont enfin présents, soudain plusieurs drames et accidents surviennent, attentats et meurtres qui poussent Harold à prendre les choses en mains car il est clair désormais qu'on lui en veut. Bientôt grâce à un policier corrompu il apprend que c'est en fait l'IRA (Irish Republican Army) qui serait à l'origine des attaques... 

Racket (1980) de John Mackenzie

Le Parrain est incarné par Bob Hoskins, remarqué dans "L'Ultime Attaque" (1979) de Douglas Hickox mais qui trouve là son premier grand rôle avant de devenir un acteur majeur, retrouvant d'abord John Mackenzie dans "Le Consul Honoraire" (1983) et surtout avec des films comme "Brazil" (1985) de Terry Gilliam, "Qui veut la Peau de Roger Rabbit ?" (1988) de Robert Zemeckis ou "Le Voyage de Felicia" (199) de Atom Egoyan. Son épouse est interprétée par la grande Helen Mirren vue auparavant dans "Le Songe d'une Nuit d'Eté" (1968) de Peter Hall ou "Caligula" (1979) de Tinto Brass mais qui est alors surtout une grande dame du théâtreavant de réellement percée bien des années après avec "Gosford Park" (2002) de Robert Altman, "The Queen" (2006) de Stephen Frears ou "L'Echappée Belle" (2017) de Paolo Virzi. L'émissaire américain est joué par Eddie Constantine acteur américain qui débuta dans le court métrage "Les Chansons s'envolent" (1950) de Henri Verneuil et qui construira surtout sa carrière en France avec son personnage culte de Lemmy Caution dans 9 films dont les plus connus sont "Aphaville" (1965) et "Allemagne Année Zéro" (1991) tous deux de Jean-Luc Godard. Citons ensuite Derek Thompson vu dans "Yanks" (1979) de John Schlesinger ou "Les Oies Sauvages II" (1985) de Peter Hunt, Bryan Marshall vu dans "Top Secret" (1974) de Blake Edwards et "L'Espion qui m'Aimait" (1977) de Lewis Gilbert, Dave King vu débuta dans "Les Pirates de l'île Tortuga" (1961) de Robert D. Webb et vu plus tard dans "Reds" (1982) de et avec Warren Beatty et "Revolution" (1986) de Hugh Hudson, P.H. Moriarty vu dans "Scum" (1979) de Alan Clarke puis dans "Jeux de Guerre" (1992) de Phillip Noyce ou "Arnaques, Crimes et Botanique" (1998) de Guy Ritchie, Paul Freeman vu dans "Les Aventuriers de l'Arche Perdue" (1981) de Steven Spielberg, "Le Hussard sur le Toit" (1995) de Jean-Paul Rappeneau ou "Hot Fuzz" (2007) de Edgar Wright, Paul Barber essentiellement vu à la télévision à l'exception notable de "The Full Monty" (1997) de Peter Cattaneo, et enfin n'oublions pas un petit rôle d'un inconnu apparu non crédité juste avant dans "Le Miroir se brisa" (1980) de Guy Hamilton, un certain Pierce Brosnan qui retrouvera John Mackenzie pour "Le Quatrième Protocole" (1987) alors qu'il sera devenu un acteur populaire grâce à la série TV "Les Enquêtes de Remongton Steele" (1982-1985) avant de devenir une star en devenant 007 dans "Goldeneye" (1995) de Martin Campbell... Enième film de mafieux pourrait-on dire, mais ce réalisateur méconnu qu'est John Mackenzie signe pourtant un polar noir diablement solide et efficace qui surprend grâce à deux paramètres formidables : la performance inouïe de Bob Hoskins, et l'ajout d'un élément géo-politique malin et bien amené. Ce qui débute comme un mafieux qui veut se payer une virginité va évidemment se faire saborder de telle manière que personne ne va s'en tirer à bon compte (ou presque), et assurément pas ceux qu'on croit.

Racket (1980) de John Mackenzie

D'abord il y a ce Parrain, tout pouvoir entre les mains depuis un certain temps ayant a priori su gérer et organiser la pègre londonienne autour de lui, et qui se prépare à profiter de l'entrée du Royaume-Uni au sein de l'Union Européenne mais qui va soudainement être obligé de revenir à des principes primaires pour sauver son projet. Attentats et meurtres sont des attaques violentes et pris par le temps Harold Shand/Hoskins va y aller fort d'entrée pour savoir qui tente de plomber son plan alors que tout semblait aller pour le mieux. Ce qui est fort c'est justement de ne pas montrer un Parrain fort et impitoyable, sans peur et sûr de lui, loin de là Harold Shand est pris par surprise à tel point qu'il se met à douter et à avoir peur jusqu'à ce qu'il comprenne, qu'il se sente de nouveau fort et roi du monde jusqu'à cette ultime fin, une scène inoubliable où Bob Hoskins nous offre une palette d'émotion d'une subtilité rare en quelques dizaines de seconde. D'ailleurs pour l'anecdote, un certain Ronald Kray (Tout savoir ICI !), célèbre gangster londonien des années 60 dont la vie a été porté notamment à l'écran avec "Legend" (2016) de Brian Helgeland, écrira à l'acteur pour le féliciter de sa performance ! Le scénario est implacable, évoluant de façon logique avec une montée en tension presque imperceptible, sans passages gratuits ou faciles même si on peut rester déçu d'un émissaire américain (Constantine) plutôt sous-exploité. La dimension géo-politique est le cerise sur le gâteau, à une époque où le mafieux est sans doute logiquement pas si serein vu les forces en présence. Un polar méconnu de haut vol qui mérite clairement qu'on s'y attarde, avec un des tous meilleurs rôles de Hoskins bien accompagné par la reine Mirren.

Note :                 

Racket (1980) John MackenzieRacket (1980) John MackenzieRacket (1980) John Mackenzie

16/20